Mieux se préparer aux conflits de demain

Les technologies quantiques constitueront un atout majeur pour développer une défense innovante, performante et efficace. Au cours des deux prochaines décennies, grâce à la compétition internationale et aux avancées scientifiques, il est fort probable que nous assistions à l’émergence de nouvelles techniques de travail voire de combat. La course au quantique est déjà lancée !

Amiral Pierre Vandier – ancien major général des armées

Major Général des Armées

Dans une conflictualité moderne où la supériorité technologique reste un atout majeur sinon décisif, le secteur de la défense exploite systématiquement les opportunités offertes par toutes les innovations, pouvant-elles être issues du monde civil.

La dimension militaire des technologies quantiques se construit selon deux axes.

D’une part, la menace. La mise en œuvre par des puissances étrangères d’équipements et systèmes d’armes intégrant des technologies quantiques leur confèrera à n’en pas douter un avantage stratégique. Or ce renforcement de la puissance doit conduire à adapter notre outil de défense, sous peine de déclassement. Même si la mise en œuvre de solutions quantiques dans notre système de défense n’était pas recherchée, le plein investissement de cette filière par les Etats étrangers entrainerait nécessairement une réponse ne serait-ce que pour maintenir nos capacités. La cryptographie post-quantique illustre très bien ce mécanisme.

D’autre part, le développement de notre système de défense. Les capteurs, la cryptographie, le calcul et les communications doivent faire l’objet d’un suivi permanent afin d’anticiper, de détecter et de s’approprier toute évolution pouvant constituer un « game changer » pour les opérations militaires.

Certaines applications, en particulier dans le domaine des capteurs et ordinateurs quantiques, ouvrent des perspectives intéressantes pour la défense.

Dans des zones de conflits où les services de « Géolocalisation et Navigation par un Système de Satellites » (GNSS) sont souvent déniés, les possibilités de navigation autonome représentent par exemple un cas d’usage d’intérêt, qu’il convient d’examiner. La navigation inertielle quantique, notamment à atomes froids, permet de fournir des taux de dérive très faibles et n’est pas susceptible de se faire brouiller.

Par ailleurs, les horloges quantiques pourraient permettre d’avoir une fonction temps résiliente au brouillage, ce qui permettrait de garder la synchronisation des réseaux radio en environnement spectral contesté.

Le domaine du calcul quantique représente également un axe de travail important. Les développements d’algorithmes exploitant les ordinateurs quantiques, dès à présent sur les technologies NISQ et à plus terme les machines FTQC, offrent des potentialités d’intérêt, par exemple pour contribuer à la planification des opérations, à l’exploitation des informations issues des capteurs de renseignement, ou encore à la simulation de phénomènes complexes liés à la physique des matériaux.

C’est dans ce cadre que le Ministère des Armées lance, avec le secrétariat général pour l’investissement (SGPI), le programme PROQCIMA. Le pilotage est confié à l’Agence du numérique de défense (AND, rattachée à la DGA). Objectif : disposer de deux prototypes d’ordinateurs quantiques universels avec 128 qubits logiques d’ici 2030.

La révolution quantique en marche est annonciatrice de ruptures technologiques majeures qui permettront de conquérir des avantages décisifs dans tous les espaces de conflictualité. Elle nous met au défi, dès à présent, de penser les modes d’actions de la guerre de demain. Elle nous incite également à accompagner, de nos réflexions doctrinales, capacitaires et opérationnelles, les recherches et les progrès scientifiques en cours.

Général de corps d’armée Bruno Baratz – Commandant du combat futur

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